Jean Sénac
Biographie
Jean Sénac (جان سيناك), né à Béni Saf en Algérie, le 29 novembre 1926 et assassiné à Alger le 30 août 1973 (sans que l'affaire ne soit élucidée), est un poète chrétien, socialiste et libertaire algérien. Il a rejoint dès 1955 la cause de l'indépendance algérienne. Originaire de Catalogne, son grand-père maternel, Juan Comma, est venu en Algérie travailler à la mine de fer de Béni-Saf. Jean Sénac, qui n'a pas connu son père, peut-être gitan, porte le nom de sa mère, Jeanne Comma (1887-1965), jusqu'à l'âge de cinq ans et sa reconnaissance par Edmond Sénac. Il passe son enfance et son adolescence à Saint-Eugène, quartier populaire d'Oran. Démobilisé en mars 1946, Jean Sénac trouve un emploi comme secrétaire dans une maison de commerce à Belcourt, logeant chez des cousins à Bab El Oued. Il fonde en juin 1946 le Cercle artistique et littéraire Lélian dont il est le président. La même année il fait la connaissance d'Emmanuel Roblès, du sculpteur André Greck, de l'architecte et peintre Jean de Maisonseul, et en 1947 de Sauveur Galliéro, Louis Nallard, Maria Manton, Louis Bénisti sur qui il publie des articles dans « Oran républicain ». En octobre 1952, il reprend son activité de metteur en ondes à la radio. Réunissant notamment dans son comité de rédaction Mohammed Dib, Sauveur Galliéro, Jean de Maisonseul, Mouloud Mammeri, Albert Memmi et Louis Nallard. En pleine période d’arabisation du pays, de la culture et de la langue, le manifeste de Sénac (à qui la littérature algérienne de graphie française est largement redevable d’un travail de mise à jour et de théorisation, qui n’existait pas) apparaît comme une ultime provocation que son auteur paiera cher : peu à peu, quasiment toutes les portes se ferment, non pas celles des gens, mais des organismes d’État sans lesquels rien n’est possible dans un pays vivant sous le signe de l’étatisme. Ce manifeste en appelle à une Algérie méditerranéenne, solidaire, socialiste, égalitaire, arabe, berbère et pied-noir, de graphies arabe, berbère et française. Kateb Yacine ne disait alors pas autre chose (in Les Lettres françaises, 1963) : « Il n’y a pas d’Algérie berbère, il n’y a pas d’Algérie arabe, il n’y a pas d’Algérie française : il y a une Algérie. Elle est une nation très riche dans la mesure où elle est multinationale ». « Poète algérien de graphie française », ainsi qu’il se définissait lui-même est mort assassiné dans sa cave-vigie d’Alger, dans la nuit du 29 au 30 août 1973. Jean Sénac fut le premier martyr d’une horrible liste. Les Français ne lui pardonnaient pas d’avoir été membre du F.L.N. pendant la guerre d’indépendance ; et le pouvoir algérien supportait mal ses positions très critiques à l’égard du système bureaucratique en place. Jean Sénac était un homme parfaitement indésirable. Son audience auprès de la jeunesse, sa vie, son homosexualité, sa liberté de parole en matière politique ou culturelle, les répercussions à l’étranger de ses jugements sur l’Algérie, en faisaient un personnage gênant pour beaucoup de personnes. Ils sont donc nombreux, ceux à qui le crime pouvait profiter. Cette mort, Jean Sénac la sentait rôder : Pourquoi suivre cette trace – d’avance tout est conclu – quand vous laverez ma face – le soleil n’y sera plus.
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